« Et
voici : j’étais issu de l’Orient et des traditions de l’Orient. J’avais
été instruit et éduqué dans les écoles d’Occident. Et non seulement la greffe
avait pris, mais l’arbre n’avait jamais donné autant de fruits. Je l’ai pris
alors à deux bras et je suis parti vers cet Occident d’où venaient toutes
sortes de greffes. Et voici : c’était comme si j’avais transporté avec moi
tout un lambeau de terre, tout un monde. Et le monde vers lequel je me
dirigeais m’a semblé froid, fermé et hostile. […]
J’ai
vu l’Occident prôner l’humanisme et agir en cruautés. Et assis entre deux
portes fermées, j’ai tant crié à la fraternité humaine et à la connaissance
mutuelle que j’en suis devenu malade, insomniaque et tressautant au vol d’une
simple mouche. […]
Longtemps,
longtemps, j’avais lutté dans un souterrain, parlant à tort et à travers
d’Orient et d’Occident. »[1]
«Fils du Levant et de la Berbérie écoutez :
l’Orient est en voie de mort. Il est derrière votre dos avec ses Damas, ses
Baghdad et ses divisions sans fin qui ensanglantent la terre et dénaturent la
parole de Dieu.[2] Plus jamais vous n’y
retournerez. Vous êtes ici à présent, en Occident, et c’est comme si vous
veniez d’y naître. Parce que, moi, je vous dis que c’est ici, en Occident, que
se lèvera désormais le soleil du monde !»[3]
[1] Driss
Chraïbi (Driis Chraïbii), Succession ouverte, Paris, Denoël, 1962, pages
180-182.
Écrivain
d’origine du Mghrib (Maroc) arrivé en France en 1945 (selon le calendrier dit
Grégorien) pour faire des études universitaires. Il n’avait pas encore vingt
ans. Il s’est installé dans ce pays et y a vécu jusqu’à la fin de son existence
ici-bas survenue le premier avril 2007 à l’âge de 81 ans (toujours selon le
calendrier dit Grégorien). Il était dans la Drôme (à Crest) lorsqu’il a rejoint
l’au-delà. Son corps a été ramené au Maroc et enterré à ddaar lbidaa
(Casablanca).
[2]
Allaah.
[3] Driss
Chraïbi, Naissance à l’aube, Paris, éditions du Seuil, 1986, P.55-56.
Je ne fait que reprendre ce que j’ai déjà
cité.
Voir :
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