mardi 23 juillet 2013

BOIRE

C’était hier, lundi.
Le 13ème jour du mois de ramdaane 1434.[1]
Il a fait très chaud.
En rompant le jeûne à vingt et une heures quarante cinq minutes, j’ai commencé par une datte et après la prière[2] du Maghrib,[3] avant de manger, j’ai beaucoup bu.
Un mélange d’eau gazeuse fraîche et de jus d’orange frais.
C’est une composition de mon épouse que nous apprécions lorsque nous avons une grande soif.
Auparavant, vers vingt heures, j’ai donné à boire aux plantes du petit jardin de la maison où nous sommes installés.
Un bonheur de sentir leur joie en accueillant l’eau.
Il m’est déjà arrivé d’en parler.
Je ne me lasse pas en effet de rappeler des souvenirs et certaines sensations liés à l’arrosage.
En arrosant, je redeviens un peu un enfant dans un jardin à Taroudanete,[4] au Maroc.
C’était en 1957-1958, je crois.[5]
Nous habitions une maison de fonction avec un magnifique jardin.
Dans mes souvenirs, il est encore plus que cela.
Des fleurs de toutes les couleurs partout.
Des orangers, des citronniers, des bananiers, des arbres dont je ne connais même pas le nom, des plantations diverses, variées.
Un enchantement.
Et la musique de l’eau.
De l’eau, Nous avons fait toute chose vivante nous dit Allaah.[6]
Le jardin disposait d’un système d’irrigation fait de « saagyaate ».[7]
La terre accueillait cette eau avec bonheur et j’étais heureux de tenir compagnie aux plantes qui se désaltéraient avec joie.
Une bénédiction.
C’était le début du Maroc de « l’indépendance dans l’interdépendance ».[8]
Mon père avait été nommé à un poste « important » et nous habitions alors cette maison de fonction avec le magnifique jardin.
Avant nous, la maison était occupée par une famille de colonialistes de France.
La France, pays où je suis installé dans la maison avec le bout de jardin.
J’arrose et je sens le bonheur des plantes et de la terre accueillant l’eau avec reconnaissance.
Avec elles, je suis reconnaissant à Allaah pour ce bienfait et pour tous les autres.
Et je suis heureux de partager la joie de ces créatures qui se désaltèrent.
Il m’est arrivé plusieurs fois d’arroser mes deux fils lorsqu’ils étaient enfants.
Ils en redemandaient.
Dernièrement je me suis arrosé moi-même au jardin.
L’un de mes  petits-fils était à côté, assis dans l’eau.[9]

BOUAZZA


[1] 22 juillet 2013 selon le calendrier dit grégorien.
[2] Salaate, salaa.
[3] Le r roulé, coucher du soleil.
[4] Le r roulé, Taroudant.
[5] Nous avons presque toujours eu des maisons avec de beaux jardins, mais souvent, c’est à celui de la maison de Taroudanete que je pense.
[6] Alqoraane (Le Coran), sourate 21 (chapitre 21), Alanebiyaa-e, Les Prophètes, aayate 30 (verset 30).
[7] Swaaguii, swaaqii, pluriel de saagya, saaqya (qui irrigue, rigole).
[8] L’indépendance dans l’interdépendance a été octroyée au Maroc par le colonialisme français en 1956.
J’avais six ans.
Dans les colonies (même si les colonialistes parlaient de protectorat pour le Maroc), ce statut s’est traduit par la multiplication des "États" supplétifs, subordonnés avec plus ou moins de zèle, de soumission et de servilité dans l’exécution des ordres des métropoles et autres employeurs.
Ces "États" sont fondés sur l’imposture, le crime, la trahison, la tromperie, la corruption, l’injustice, la perversion, la débauche, le mensonge, le pillage, l’oppression, l’exploitation, le viol, la tyrannie, la torture, l’enfermement, la négation de l’être humain.

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