"Il
s'appelait Al-Khadir[1]
lorsqu'il avait rencontré Moïse,[2] le guide
des Hébreux errants, à la croisée des deux mers. Il portait un chapelet de
poissons enfilés par les ouïes. Moïse[3] était au
plus fort de ses tourments et lui avait demandé s'il pouvait faire route en sa
compagnie quelques heures ou quelques jours. "Tu n'auras pas assez de
patience, fils", lui avait répondu Al-khadir.[4]
Ils
avaient traversé un fleuve à bord d'une barque de pêcheur et, parvenus sur la
terre ferme, il avait percé le fond de cette barque et l'avait rendue
inutilisable, à la grande stupéfaction de Moïse.[5] "Je
te l'ai dit, fils, que tu n'auras pas assez de patience." Fort civil, bien
mis de sa personne, un doux jeune homme rencontré au cours de leur voyage les
avait renseignés sur la direction à prendre pour atteindre la ville. Et,, en
guise de remerciement, il l'avait tué."Tu es révolté Moïse.[6] Tu ne
comprends pas. Tu n'as pas une once de patience". Á l'entrée de la cité,
il avait détruit un mur, sans dire un seul mot.
Trois
gestes gratuits, déments ─ du moins aux d'un homme doué de raison.
─
Nos destinées se séparent ici, avait-il conclu.
Je
n'ai quitté ma retraite que pour accomplir en ta présence ces faits que tu
condamnes. La barque devait être empruntée à la fin du jour par une famille de
six personnes qui se seraient toutes noyées: elle prenait l'eau. Le mur cachait
un trésor que cherchaient en vain des héritiers. Quant au jeune homme, si je ne
lui avais pas ôté la vie, le lendemain il aurait tué son père et sa mère et ses
proches dans un accès de folie. Il y a l'apparence qui nous semble si manifeste
en ce monde que nous la prenons pour la réalité. Mais derrière cette apparence,
il y a le sens profond. Et parce qu'il est très profond, nous ne le voyons pas.
Écoute: je vais ajouter à tes tourments en soulevant quelques voiles, car là
sera ta mission.
L'écrivain,
Driis[9]
Chchraaïbii,[10]
a mal repris des faits et ne les a pas rapportés tels qu'ils sont contenus dans
Alqoraane,[11]
qui relate cette quête de Mouçaa sur lui la bénédiction et la paix, accompagné
d'un jeune disciple,[12] à la
recherche d'un serviteur d'Allaah, pour apprendre auprès de lui:
"Ils
trouvèrent l'un de nos serviteurs à qui Nous avions donné une grâce[13] de
Notre part et à qui Nous avions enseigné une science émanant de Nous.[14] Mouça
lui dit: "Pui-je te suivre à condition que tu m'apprennes quelque sagesse
de ce qu'on t'a appris?" Il dit: "Jamais tu n'auras assez de patience
en ma compagnie. Comment supporterais-tu avec patience ce qui n'est pas du
domaine de ton savoir?" Il dit: "Tu me trouveras, si Allaah veut,[15] patient
et je ne désobéirai à aucun de tes ordres". I l dit: "Si tu me suis,
ne m'interroge sur rien tant que je ne t'en aurai pas fait mention". Ils
se mirent en marche et montés dans la barque,[16] il la
transperça. Il[17]
dit: "L'as-tu transpercé pour noyer ses occupants? Tu as commis un acte
abominable". Il dit: "N'ai-je pas dit que tu ne pourrais pas garder
patience en ma compagnie?"[18] Il dit:
"Ne me tiens pas rigueur pour un oubli de ma part et ne m'accable pas dans
mon entreprise de trop de difficultés". Ils se remirent en marche et quand
ils eurent rencontré un garçon,[19] il le
tua. Il dit: "As-tu tué un être innocent, qui n'as tué personne? Tu as
commis une chose affreuse".Ne t'ai-je pas dit que tu ne pourrais pas
garder patience en ma compagnie?" Il dit: " Si je te questionne sur
quoi que ce soit après cela, ne reste plus en ma compagnie. Tu seras excusé de
te séparer de moi". Ils se remirent en marche et lorsqu'ils furent arrivés
à un village habité, ils demandèrent à manger à ses habitants qui refusèrent de
leur donner l'hospitalité et trouvèrent un mur qui menaçait de s'écrouler et le
restaura. Il dit: "Si tu voulais, tu en exigerais un salaire". Il
dit: "Ceci marque la séparation entre toi et moi. Je vais t'informer de la
signification de ce que tu n'as pas pu supporter avec patience. Pour ce qui est
de la barque, elle appartenait à des pauvres gens travaillant en mer et j'ai
voulu la rendre défectueuse car il y avait derrière eux un roi qui s'emparait
de toute barque par la force. Quant au garçon, ses deux géniteurs[20] étaient
des croyants[21]
et nous avons craint de le voir les accabler par ses comportements tyranniques
et par sa mécréance. Et nous avons voulu que leur Seigneur leur accordât en
échange un autre plus pur et plus affectueux. Et pour ce qui est du mur, il
appartenait à deux garçons orphelins dans la ville et il y avait dessous[22] un
trésor à eux et leur père était vertueux; ton Seigneur a voulu que tous deux
atteignent leur maturité et extraient leur trésor, par une miséricorde[23] de ton
Seigneur. Je ne l'ai pas fait de mon propre chef. Voilà l'interprétation de ce
que tu n'as pas pu endurer avec patience".[24]
[1]
Alkhidr, le ʺrʺ roulé, un sage.
[2]
Le Messager et Prophète de L'Islaam, Mouçaa sur lui la bénédiction et la paix.
L’Islaam
depuis Aadame (Adam) sur lui la bénédiction et la paix, consiste à faire de son
mieux pour Adorer Allaah, comme Allaah le demande.
[3]
Mouçaa le Messager et Prophète de l'Islaam, sur lui la bénédiction et la paix.
[4]
Alkhidr.
[5]
Mouçaa le Messager et Prophète de l'Islaam, sur lui la bénédiction et la paix.
[6]
Mouçaa le Messager et Prophète de l'Islaam, sur lui la bénédiction et la paix.
[7]
Mouçaa le Messager et Prophète de l'Islaam, sur lui la bénédiction et la paix.
[8]
Driss Chraïbi, L'homme du Livre, Balland-Eddif, 1994-1995, p. 30-31.
[9]
Idriis (le ʺrʺ roulé).
[10]
Achchraaïbii (le ʺrʺ roulé).
[11]
Le ʺrʺ roulé, Le Coran.
[12] Les
commentateurs sont d'accord pour voir en ce jeune disciple Youch'e Ibn Noune
(Josué fils de Noun) sur eux la bénédiction et la paix.
[13] Rahma
(le ʺrʺ roulé), miséricorde.
[14] Mouçaa
sur lui la bénédiction et la paix croyait être le plus savant de son temps et
Allaah a voulu lui démontrer qu'au dessus de chaque savant il y avait un
savantissime.
Il
lui ordonna d'aller vers ʺla jonction des deux mersʺ, là où se trouvait un sage
ayant reçu d'Allaah une science tout autre que celle de Mouçaa sur lui la
bénédiction et la paix.
La
tradition islamique nomme ce sage, ʺAlkhadirʺ (le verdoyant), pour la seule et
bonne raison que dès qu'il s'installe sur la terre, même la plus aride, elle se
couvre aussitôt de verdure. On dit même, qu'ayant revêtu une tunique blanche,
elle devint immédiatement verte. Or la couleur verte est symbole de bénédiction
et de sainteté.
On
est partagé entre les avis qui disent que ce fut un Prophète et ceux qui disent
que ce fut simplement un saint homme détenant quelque chose des sciences de
l'inconnu.
[15] Ine
chaa-e Allaah.
[16]
Safiina, bateau.
[17] Mouçaa
sur lui la bénédiction et la paix.
[18] Être
endurant en ma compagnie.
[19]
Gholaame.
[20]
Abawaah, ses père et mère.
[21] Mouminayne
(pluriel duel).
[22] Du mur.
[23] Rahma
(le ʺrʺ roulé); grâce.
[24] Dans ce
chapitre que Mohammad, l'ultime Messager et Prophète de l'Islaam sur lui la bénédiction
et la paix, qualifie de ʺ'arouçe alqoraaneʺ (les ʺrʺ roulés), il y a une source
abondante de principe moraux dont certains caractérisent particulièrement
l'Islaam.
Il
y a d'abord une leçon de modestie pour ceux qui se croient savants. On rapporte
qu'un petit moineau plongea son bec dans la mer et que Alkhadir dit alors à
Mouçaa sur lui la bénédiction et la paix: "Toute ma science et la tienne
ne sont devant le savoir d'Allaah que ce que représente par rapport à la mer ce
que cet oiseau en a pris dans son bec".
Il
y a une leçon de patience devant tout ce que Allaah décide pour nous car
souvent, malgré les apparences, Allaah ne vise par là que notre bien.
Salaah
Addiine Kachriid (Salah Eddine Kechrid), traduction du Qoraane (Coran),
Loubnaane (Liban), Bayroute (Beyrouth), éditions Daar Algharb Alislaamii,
cinquième édition, 1410 (1990), première édition, 1404 (1984).
Notes en bas des pages 389,
390 et 392.
Sourate
18 (chapitre 18) Alkahf, La Caverne, aayate 65 à aayate 82 (verset 65 au verset
82).
Voir:
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