Il avait l’habitude, paraît-il, de
dire à une de mes sœurs[1] :
« Une bonne grand-mère, vaut
mieux qu’une mauvaise mère ».
Notre père faisait ainsi allusion
à un épisode de sa trajectoire ici-bas[2] que cette
sœur connaît.[3]
Cet épisode se rapporte à sa mère
qui n’a pas été à la hauteur du mariage.[4]
Elle trompait son mari.
Comment, en tant qu’épouse et
mère, a-t-elle ignoré la dignité, l’honneur, le respect et l’estime de soi et
de l’autre, la confiance, la responsabilité ?
Qui l’a empêchée de saisir le
Sens ?
De renforcer le Lien ?
L’infidélité.
La trahison.
Une nuit, l’enfant[5] avait
accompagné son père en embuscade dans un ravin, pour éliminer le coupable,[6] qui
empruntait le chemin, à proximité du lieu où il était attendu.
À
cette époque, les troupes colonialistes étaient engagées contre la résistance
des populations. Le colonialisme enrôlait des supplétifs locaux, pour servir de
chair à canon, afin de limiter les pertes parmi les effectifs de la soldatesque
métropolitaine qui elle, était considérée comme de la chair à canon de
« qualité », à traiter autrement.
Le mari, trahi par l’épouse [7]coupable,
s’était laissé enrôler par les colonialistes de France.
Et s’était fait tuer.[8]
La grand-mère maternelle de notre
père a pris soin de son petit-fils, lui a prodigué beaucoup d’amour et lui a
légué une bonne fortune.
Comment a-t-il vécu l’infidélité,
la trahison de sa mère ?
Quelle a été la place de ce drame
dans son parcours ?
Quels furent ses sentiments réels
en découvrant ce qu’était sa mère ?
Comment a-t-il vécu le décès de
son père ?
Seul Allaah connaît l’intimité
des cœurs.
Les années se sont écoulées.
Les saisons ont succédé aux
saisons.
Et à chaque fois qu’il en avait
l’occasion, notre père répétait à ma sœur :
« Une bonne grand-mère, vaut
mieux qu’une mauvaise mère ».[9]
BOUAZZA
Sur la
photo, notre père est au milieu, habillé différemment des autres et portant des
lunettes noires.
[1] De six ans mon aînée.
[2] Il a rejoint l’au-delà le
samedi 4 octobre 2008, selon le calendrier dit grégorien, à l’âge de quatre
vingt six ans.
[3] Je crois que peu de
personnes dans la famille l’ignorent.
J’en ai déjà parlé.
[4] Lui-même ne l’a pas été.
[5] Notre père.
[6]
L’obscurité était totale et la cible n’avait pas été atteinte.
[7] Notre
grand-mère paternelle et son premier époux, notre grand-père, avaient eu une
fille avant notre père et une après.
Suite à son mariage avec
celui qu’elle fréquentait en dehors de son époux, notre grand-père, elle a eu
deux fils (dont un est aujourd’hui décédé) et une fille (aujourd’hui décédée
également).
Nos oncles et notre tante.
Notre grand-mère est
décédée quelques années après son premier mari.
Leurs filles, nos tantes,
que je n’ai pas connues, sont décédées quelques années après leur mariage.
Le second mari de notre
grand-mère a vécu de longues années après elle.
Il a eu d’autres femmes.
Et d’autres enfants, dont
une fille, de mon âge qui était scolarisée dans le même établissement que moi à
Lkhmiçaate (Khémisset).
Elle avait épousé le frère
cadet du premier mari de ma sœur qui recevait la ″confidence″ de notre père.
Les deux frères sont
aujourd’hui décédés.
Le deuxième mari de notre
grand-mère aussi.
Ce second mari venait à la
maison où il était reçu comme le père de nos oncles et de notre tante.
[8] Ce
décès a valu à notre père d’être scolarisé, de force, dans les établissements
du colonialisme qui en a fait un agent administratif subalterne.
À ″l’indépendance
dans l’interdépendance″, il a
été nommé à un poste ″important″.

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